Français: thèmes,méthodes X.Baux

Français: thèmes,méthodes X.Baux

Reflexions sur l'évolution du sport et celle de la société

Parmi les évolutions que vous pouvez observer dans les pratiques sportives lesquelles vous semblent révéler- directement ou non- un état ou une tendance de la société dans son ensemble ? Donnez des exemples en essayant de dire pourquoi et comment…

 

 

Le sport, par nature, n’a pas plus vocation à refléter la société que d’autres activités, et si tant est qu’il le fasse, ce n’est pas toujours de manière directe. Au demeurant, il a pris au cours du XXème siècle une importance quantitative, symbolique, sociale tellement considérable –et tellement supérieure à d’autres activités artistiques, ludiques, sociales- que ses changements, ses pratiques révèlent nécessairement quelque chose de la société dans son ensemble. Lorsqu’une activité ou un spectacle sportif réunissent plus de participants que les premiers pas sur la lune ou la libération de Paris à la fin de la guerre, on est obligé de lui accorder au moins un peu signification sociologique…Trois aspects : le sport des séniors, le sport « libre » et le sport en salle nous permettront d’illustrer la réflexion sur les aspects représentatifs de sport.

 

 

Certaines des évolutions du sport reflètent des faits sociaux faciles à repérer de façon assez directe. Ainsi a-t-on vu depuis plusieurs années les pratiques sportives des « séniors » croitre régulièrement. Aussi bien dans un cadre informel -randonnée, natation libres etc…- qui échappe en partie aux fédérations et clubs, que dans des cadres plus contraignants - associations, équipes, voyages de groupe-  les séniors sont de plus en plus nombreux à pratiquer. Cette évolution touche même, quoique de façon plus marginale, le sport de compétition dont les anciens compétiteurs souhaitent prolonger le goût. Ainsi les fédérations de football, tennis, golf, cyclisme voire rugby ont-elles crée ces dernières années des évènements et/ou compétitions destinées à des pratiquants plus âgés ayant dépassé quarante, cinquante, voire soixante et même soixante dix ans courses cyclo-sportives, championnats de football « vétéran » ou autres compétitions sportives pratiquées par des adeptes plus âgés, n’ont cessé de croitre. Il est vrai que l’âge biologique a reculé d’environ dix ans dans les dernières décennies.

Voir là le reflet d’une société qui a gagné à la fois en temps libre, en durée de vie, en maintien de la santé, en acquis sociaux liés à la cessation du travail –du moins jusqu’à une période récente- n’est ni compliqué ni contestable. On vit plus vieux, en meilleure santé, avec plus d’habitude de temps libre dans une société qui ne cesse de vieillir : le sport concerne donc désormais les gens bien après la trentaine, laquelle restait souvent sa limite jusque dans les années cinquante.

Et comme les nouveaux séniors aiment s’occuper d’eux plus que leurs parents cela renforce la tendance.

 

 

Sur d’autres plans le reflet possible que nous offre le sport est plus difficile à comprendre et interpréter, les hypothèses sont plus incertaines. Par exemple, dans de nombreux domaines on peut constater l’affirmation de pratiques sportives sur un mode individuel, ludique, hédoniste voire anticonformiste. On joue désormais au foot sur tous les terrains improvisés, « entre copains », sans contraintes de temps et sans les enjeux stressants de la compétition. On skie ou on surfe, hors slalom, hors « école de ski » voire avec ses propres codes vestimentaires et parfois même hors piste. On surfe hors des cadres associatifs traditionnels, avec son groupe, ses connaissances en récusant des normes considérées comme trop lourdes. On pratique le vélo hors du champ des compétions d’autrefois qui animaient les dimanches de campagnes : BMX en mode « free », VTT hors des sentiers battus, descente sur les pistes de skis, ballades sans contraintes etc…

Doit-on discerner dans ces phénomènes l’image d’une société dans laquelle les contraintes, les lois du jeu et des groupes, le goût de l’effort et de la discipline, la pratique collective laissent place au goût de la liberté, de l’individuel, de l’imprévu ? Le jeu plus que la compétition, le plaisir plus que l’effort, les copains plus que le club, l’original plus que la tradition ?

Probablement, mais cela signifie t-il une forme de décadence dans un monde où l’individualisme le zapping, le refus des obligations sociales voire des règles de vie en société reculent ? 

Ou plutôt le fait que dans un monde exigeant, dur, prévisible, industrialisé,  parfois inhumain et obnubilé par le rentable et le rationnel, les hommes  recherchent une place pour le jeu, le rire, l’improvisation, la liberté et  le plaisir immédiat qui leur font oublier les soucis ?

 

Si l’on tente d’interpréter les évolutions sportives sur le terrain psychosocial ou sociologique, on ne peut éviter une interrogation sur le développement des sports en salle type musculation, fitness, cardio-training etc… Fortement implantée en Amérique cette tendance est désormais marquée en Europe et donc en France et constitue même souvent pour les urbains la seule forme de sport.

Que nous dit sur notre monde et notre époque la mode de ces « usines à sueur » (comme disent les détracteurs) ou « espace jeu-santé » (comme disent les adeptes) ?

Plusieurs hypothèses sont possibles. D’abord on peut remarquer que c’est un reflet assez marqué des contradictions d’aujourd’hui : de même qu’on regarde à la télévision des émissions qu’on méprise, de même qu’on limite notre vitesse en construisant des voitures toujours plus puissantes, on transpire à la salle tout en prenant voiture ou scooter pour s’y rendre même lorsqu’elle est à moins de trois minutes à pied. On vient faire du vélo en salle ou du tapis roulant mais plus personne ne va au travail à pied, on sue à la musculation ou au fitness pour rester mince mais Mc Do et autres vendeurs de produits grossissants n’ont jamais eu autant de succès…

Par ailleurs, on peut observer un souci de la « rentabilité », comme un reflet de notre monde économique : la salle c’est transpirer le plus dans le moins de temps, de la façon la plus commode…en quelque sorte, la recherche du meilleur rapport temps passé/ sueur dépensée. L’ensemble étant d’ailleurs très bien orchestré par un marketing intelligent puisqu’on fait, dans les salles, en dépensant beaucoup, ce que souvent on pourrait faire gratuitement ailleurs.

Enfin, on peut y voir peut-être un souci du corps, de l’apparence physique, qui semble concurrencer directement les sports qui avaient plutôt une vocation d’apprentissage social et collectif. En d’autres termes, là où certains développent leurs vertus sociales (sports collectifs), d’autres pratiquent en masse, mais seuls, dans l’unique but d’affiner leur corps. La salle, ce serait un peu au sport ce que le casque du MP3 est à la musique : plus d’orchestre ni de fanfare mais des gens qui écoutent, souvent seuls, les mêmes choses, les uns à coté des autres…

 

 

Rien ne permet d’affirmer avec certitude que le sport est un reflet précis de notre société et de ses évolutions mais les exemples que nous avons pris indiquent au moins qu’il n’échappe pas aux modes et aux mouvements d’une société dans laquelle il pèse désormais d’un poids considérable.

 

X.Baux. IFC languedoc/Provence.

 

 



17/09/2011
0 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 25 autres membres