Français: thèmes,méthodes X.Baux

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quand le sport symbolise...sujet de ref. générale

Pourquoi certains sports, certaines équipes, certains champions deviennent-ils de symboles ou des mythes, pourquoi sont-ils l'objet d'un culte aux yeux d'une nation ou d'une communauté ?

 

 

 

La question de savoir pourquoi et/ou comment certains sports ou plus précisément certains champions deviennent symboliques ou revêtent valeur de mythe pour un peuple ou une communauté est complexe, elle admet donc des approches différentes et des hypothèses variées. A défaut d'être exhaustif, on peut en évoquer quelques pistes en allant du plus évident au plus mystérieux.

 

A titre de remarque préliminaire, on d'abord remarquer qu'un peuple est parfois symbolisé par un cliché venu de l'extérieur ce qui est différents du fait de SE reconnaître dans un sport ou un champion. Le sport symbole ou culte d'un peuple n'est pas toujours (ou plus tout à fait) le plus populaire (parfois oui : le foot au Brésil) ou le plus pratiqué mais plutôt le plus proche de sa culture de son histoire (le ski en Autriche, le judo au Japon, le Tae Kwen Doe en Corée, le rugby en Nouvelle Zélande …).

« Symbole », « mythe », « culte » dans notre énoncé veut dire à la fois représenter, donner une identité, incarner une vertu, donner une image, illustrer des valeurs, prendre place dans l'histoire etc…

 

Comme annoncé plus haut, on peut donc partir du plus simple pour aller vers le plus complexe et/ou le plus hypothétique.

 

Ainsi peut-on, sans grand risque, rappeler que certains sports sont liés à des aspects géographiques, climatiques, sociaux spécifiques de certains peuples. Les peuples des montagnes -Suisse, Autriche- par exemple se sont souvent reconnus dans leurs skieurs de descente ou de fond, de même que les Canadiens ou les Norvégiens peuples de contrée boisées et froides, dans lesquelles les activités de déplacement sur neige étaient essentielles et constituaient un mode de vie avant d'être un sport. Cela plus encore que la France ou l'Italie, par exemple, qui ont aussi des montagnes mais qui se réduisent mal à ce seul aspect. Lorsqu'un sport est lié au mode de vie quotidien traditionnel d'un peuple il est souvent considéré comme constitutif d'une identité.

 

Cet aspect simple peut être dépassé par des hypothèses plus subtiles mais aussi plus contestables sur l'esprit d'un peuple : on dit par exemple que le rugby a su merveilleusement allier le goût du combat physique et l'esprit des tribus, au sens de la conquête, de la discipline des anglo-saxons en Nouvelle Zélande ou en Australie…en une sorte de syncrétisme sportif, propre à ces peuples.  Toutefois, l'hypothèse est incertaine car on dit aussi que l'esprit rural et combatif des villages du sud de la France où l'on défend son clocher s'est incarné dans ce sport auquel on accorde, par ailleurs, la valeur de symbole des élites anglaises formées au combat de groupe et au commandement des hommes…

A force d'accorder au rugby des valeurs représentatives on finit par se poser la question : de quoi le rugby est-il le symbole dans tout cela… des peuples de l'hémisphère sud ? Des grandes écoles anglaises ? De la ruralité du sud de la France ?

Peut-être de tout cela à la fois, car un même jeu peut-être investi de façon différente par différents peuples. Ainsi pour rester sur l'exemple rugbystique, les français se sont-ils souvent reconnus dans un style fantaisiste, offensif, risqué mais spectaculaire alors qu'ils ont accordé aux anglais les vertus (ou les défauts) du style calculateur, stratégique, économe et aux Irlandais le « fighting spirit »  ou esprit de combat -pour lequel ils ont d'ailleurs  plus de sympathie que pour le précédent.

 

La réflexion sur les raisons qui font d'un sport un symbole et/ou un culte dans un pays ou une région mènent à des probabilités plus qu'à des certitudes. On peut volontiers imaginer que l'esprit des samouraïs transmis et mythifié par le temps et les récits imprègne encore un peu le Japon et le conduit plus qu'un autre pays, à mettre identité et fierté nationale dans ses judokas. On peut supposer que l'Angleterre des ouvriers et des usines, inventrice du football et supportrice, de générations en générations, de clubs enracinés dans la culture locale, entassée dans des stades brumeux au cœur des villes, considère le football comme un morceau d'elle-même, mais tout cela reste de l'ordre de la supposition car il est  toujours complexe de savoir ce qu'est « l'esprit d'un peuple », même si à l'instar du rugbyman-écrivain D.Herrero (l'esprit du jeu l'âme des peuples) on peut supposer qu'il existe forcement un rapport entre ce que sont les peuples et ce à quoi ils jouent ou la manière dont ils jouent.  

 

Il a été question jusque là des activités en elles-mêmes, évoquons maintenant les hommes, les équipes, les champions. Pourquoi certains sont-ils l'objet d'un culte ? Ici encore, plusieurs explications peuvent être avancées, certaines sont presque incontestables d'autres plus audacieuses et plus susceptibles d'être contestées.

De manière très générale, on peut souligner que l'encadrement formel de l'activité sportive : couleurs, écussons, maillots, hymnes, drapeaux etc encourage largement la symbolique patriotique voire la métaphore guerrière.

On ne peut se contenter de cette remarque, parmi les idées simples qui expliquent la place d'un champion dans l'imaginaire collectif, on peut évoquer les circonstances historiques. Lorsqu'un champion est associé à une lutte, une forme de résistance ou de rébellion identitaire, il devient vite un symbole. On connaît l'exemple du football club de Barcelone dont la devise depuis la guerre civile est « plus qu'un club » parce qu'il a représenté et représente encore un part de l'histoire et de l'identité catalane dans son opposition au franquisme. On peut évoquer encore le « mythe Marcel Cerdan » qui a incarné en devenant champion du monde de boxe dans l'après guerre une forme de renouveau (son mythe ayant été, bien entendu, accentué par sa mort prématurée et par son aventure amoureuse avec une autre personnalité de cette époque largement mythifiée : E.Piaf..

Lors des jeux olympiques de Berlin en 36, le magnifique champion noir américain Jessie Owens, provoquant la colère d'Hitler par ses victoires sur les athlètes « Aryens » s'est élevé comme un mythe dans la légende du sport nord américains et plus largement dans l'histoire des jeux. La raison en est qu'il fut un extraordinaire athlète mais aussi que les circonstances historiques de son succès furent particulières. Parfois ces circonstances favorisent le la construction des légendes : ainsi le footballeur juif autrichien, M. Sindelar, « le Mozart du foot, mort en 1939 refusa toujours de jouer pour l'équipe d'Allemagne après l'anschluss. On connaît mal les circonstances de sa mort mais on dit qu'il aurait été assassiné par la gestapo ou encore qu'il se serait suicidé plutôt de d'avoir à porter le maillot du pays des nazis. Quoiqu'il en soit l'histoire en a fait un symbole du malheur de l'époque et de l'esprit résistant.

Il arrive aussi qu'une équipe ou un champion incarne, parfois même sans le vouloir, l'esprit d'un groupe humain, parce qu'il lui permet de s'affirmer aux yeux du monde. Pour la nation Serbe, encore marquée par l'image de la guerre en ex-Yougoslavie, dévalorisée sous les regards internationaux par ses criminels de guerre, l'émergence du tennisman Djokovic, la victoire en coupe Davis, l'image de ce sportif populaire et original, permet au peuple Serbe d'exister autrement dans l'esprit des voisins européens. Les coureurs Kényans, qui représentent, à la fois, les qualités des hommes des hauts plateaux et qui portent au regard de millions de téléspectateurs un drapeau peu souvent à l'honneur, sont des idoles chez eux et des symboles pour le monde (même s'il s'agit là d'une vision réductrice).

Parfois c'est plutôt une génération qui se reconnaît dans un champion ou une équipe qui parait symboliser l'époque ou qui en porte les marques. Ce fût souvent le cas dans les années 60-80 avec des champions que les jeunes considéraient comme différents de ceux de l'époque de leurs parents. Ainsi à la fin des années 60, toute l'Angleterre jeune se reconnut dans l'idole absolue Georges Best, brillant joueur, cheveux longs et attitude de rock star, alcoolique, joueur et fêtard…auquel une navette spéciale du royal mail apportait des milliers de lettres chaque jour ! Dans les années 70, D.Rocheteau, ailier de la grande équipe de Saint-Etienne, fut surnommé « l'ange vert », ses cheveux longs, son allure juvénile, son coté « pop music » en firent une idole incroyablement populaire auprès des jeunes, plus tard l'émergence de champions au look novateur comme Y.Noah en tennis, compétiteur mais sensible, fort et fragile à la fois, L.Fignon en cyclisme ; insolent et original, correspond assez bien à l'esprit d'une génération qui s'est plus reconnu dans ces champions –au palmarès brillant mais pas inégalé- que dans des sportifs plus classiques ou plus normés.

 

On le voit: les possibilités sont multiples. Les faits sont incontestables, le sport et ses acteurs revêtent une valeur identitaire et confinent au mythe…pourquoi et comment ces questions ne relèvent pas d'une science exacte mais plutôt d'hypothèses qui peuvent toujours être contredites.

X.Baux. IFC

 

 

 

 

 



27/09/2011
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